Voici ce qu’a déclaré Valérie-Masson Delmotte lors de la conférence de presse de la publication du nouveau rapport du groupe 1 du GIEC, le 9 août 2021 :
« Nous aimerions que l’ensemble du rapport contribue à améliorer la connaissance du climat dans le monde entier, qu’il soit utilisé dans l’enseignement à l’échelle mondiale pour les adolescents et les étudiants, afin qu’ils puissent acquérir les dernières et meilleures connaissances disponibles. »
Message entendu !
Un article a déjà été réalisé pour synthétiser les documents SPM (résumé pour décideurs) et TS (Technical Summary). Même synthétisé, le vocabulaire utilisé n’est pas forcément très accessible. En effet, malgré les efforts de communication du GIEC, ces résumés restent parfois un peu difficiles à lire.
C’est pourquoi je vous propose ici une version ‘grand public’, quelque chose que j’aurais aimé lire pour commencer. Cette version se veut accessible à toutes et tous, peu importe votre niveau d’études. Les enseignant(e)s et professeur(e)s pourront également se l’approprier pour faire découvrir ces sujets déterminants pour notre avenir. C’est la première fois dans l’histoire qu’un rapport scientifique a et aura autant d’importance, tant sur le plan scientifique, politique, géopolitique et économique.. Cela mérite l’attention de toutes et tous, et un peu de travail pour le rendre accessible.
Cet article est composé de 3 parties :
- Qu’est-ce que le GIEC
- Les messages clefs du rapport
- Observer le changement climatique et ses possibles évolutions et conséquences
Puis un bonus avec des infographies, que vous pourrez sauvegarder, partager, imprimer… tout ce que vous voulez pour faire passer le message !
1/ Qu’est-ce que le GIEC
Le Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat (GIEC) a été créé en 1988 en vue de fournir des évaluations détaillées de l’état des connaissances scientifiques, techniques et socio-économiques sur les changements climatiques, leurs causes, leurs répercussions potentielles et les stratégies de parade.
- Le GIEC n’est pas une association de personnes physiques, mais une association de pays : ses membres sont des nations, non des personnes physiques. Les personnes qui siègent aux assemblées du GIEC ne font que représenter des pays membres.
- La transparence du GIEC est totale, tout est sur le site Internet : comment se fait la sélection des auteurs, sur quels documents ils se basent, comment les rapports sont approuvés, etc..
- Le GIEC n’est pas un laboratoire de recherche. C’est un organisme qui effectue une évaluation et une synthèse des travaux de recherche menés dans les laboratoires du monde entier.
- Il y a 3 principaux groupes de travail (les working groups) et une Task Force (groupe de soutien) :
- Le premier rapport (ici étudié) traite de la compréhension physique du système climatique et du changement climatique.
- Le second portera sur les impacts, l’adaptation et la vulnérabilité des sociétés humaines et des écosystèmes au changement climatique
- Le troisième abordera les solutions globales à mettre en œuvre pour atténuer le changement climatique et ses effets. Les groupes 2 et 3 doivent approuver leurs rapports en février et mars 2022. Le rapport de synthèse est prévu pour septembre 2022.
- Le GIEC ne fait pas de recommandations, mais des projections.
- Le GIEC fait une synthèse de tous les articles scientifiques, à condition que ces travaux aient été validés par les pairs (peer reviewed) dans une revue scientifique.
- Chaque ligne du résumé pour les décideurs est validée par un délégué, qui représente un pays
Les messages clefs du rapport
Voici les messages clefs à retenir que le GIEC a mis en avant dans son résumé pour décideurs :
L’état actuel du climat
A.1 Il n’y a plus aucun doute : l’homme réchauffe l’atmosphère, les océans et les terres. Ces changements sont généralisés et rapides. A.2 L’ampleur des changements climatiques actuels n’a pas été observée depuis des siècles, voire des milliers d’années. A.3 Les preuves d’une responsabilité humaine (dite anthropique) dans les vagues de chaleur, les pluies torrentielles, les sécheresses et les tempêtes tropicales sont beaucoup plus fortes.
Futurs climatiques possibles
B.1 Le réchauffement des températures se poursuivra au moins jusqu’en 2050, mais nous pouvons encore éviter un réchauffement de 2°C, voire de 1,5°C, par rapport à l’ère préindustrielle si nous réduisons fortement les émissions de gaz à effet de serre très rapidement. B.2 Avec le réchauffement de la planète, on assistera à une augmentation de la fréquence et de l’intensité des chaleurs extrêmes sur terre et dans les océans, des pluies diluviennes, de la sécheresse dans certaines régions, des tempêtes tropicales, ainsi qu’à une diminution de la glace de mer arctique, de la couverture neigeuse et du pergélisol. B.3 A l’échelle mondiale, les moussons connaîtront des extrêmes plus importants, entre humidité et sécheresse. B.4 Si les émissions de CO2 continuent d’augmenter, les océans et les terres seront de moins en moins capables d’en absorber. B.5 Certains impacts seront irréversibles pendant des milliers d’années, comme la fonte des calottes glaciaires et l’élévation du niveau des mers.
Informations climatiques pour l’évaluation des risques et l’adaptation régionale
C.1 Les phénomènes climatiques naturels tels qu’El Niño et La Niña continueront d’avoir un certain impact sur certaines régions à petite échelle, mais dans l’ensemble, ils auront peu d’impact sur la tendance à long terme du réchauffement de la planète. C.2 Comparé à un réchauffement à +1.5°C, les impacts seront plus importants avec un réchauffement de 2°C . En d’autres termes, chaque fraction de degré que nous pouvons éviter compte. C.3 Même si l’effondrement des calottes glaciaires et des circulations océaniques est peu probable d’ici 2100, nous ne devons pas ignorer cette possibilité.
Limiter le changement climatique futur
D.1 Pour mettre fin au réchauffement de la planète, il faut au moins atteindre la neutralité pour le CO2 et réduire fortement les émissions des autres gaz à effet de serre.D.2 Une réduction rapide et brutale des gaz à effet de serre peut rapidement conduire à un climat plus stable et à une meilleure qualité de l’air.
Observer le changement climatique et ses possibles évolutions et conséquences
Les infographies dans le nouveau rapport du GIEC sont superbes, notamment celles du résumé pour les décideurs. Ces cartes/infographies permettent de visualiser comment le climat a évolué et ses possibles évolutions en fonction de nos émissions. En voici quelques-unes (liste non exhaustive).
Figure SPM.1
Grâce à cette Figure SPM.1, nous pouvons voir instantanément que la vitesse de réchauffement est ‘sans précédent’. Le graphique de droite (un zoom de la figure de gauche, de 1850 à nos jours), permet de visualiser ce qui se passe lorsque l’on change d’échelle. On voit clairement que nous avons atteint environ 1,1 à 1,2°C de réchauffement par rapport aux niveaux préindustriels, ce qui ne peut pas être expliqué par les seules causes naturelles (en bleu).
Figure SPM.2
FIGURE SPM.2 : comprendre le forçage radiatif est très important lorsque l’on cherche à savoir ce qui provoque le réchauffement et comment la science le démontre. C’est une base indispensable et je recommande vivement que vous y passiez quelques minutes.
Ici nous voyons les barres (marges) d’erreur en action. Cela montre que les scientifiques tiennent compte de l’incertitude, élément clef lorsque l’on s’aventure à lire un rapport du GIEC (et/ou n’importe quel rapport scientifique). Qu’est-ce que cela signifie ?
Dans le scénario exceptionnellement improbable où toutes les influences humaines se situent au bas de leurs barres d’erreur et où toutes les influences naturelles se situent au haut, cela ne suffirait pas à expliquer le réchauffement. C’est ainsi que les scientifiques peuvent se permettre de dire « sans équivoque« .
Figure SPM.3
Figure SPM.3 : voici une infographie qui permet de voir, selon les évènements météorologiques extrêmes, quelles régions seront touchées et avec quel degré de confiance.
Le GIEC rappelle également que « les facteurs naturels et la variabilité interne moduleront les changements causés par l’homme, surtout à l’échelle régionale et à court terme, avec peu d’effet sur le réchauffement climatique centennal« . Ces modulations sont importantes à prendre en compte dans la planification de l’ensemble des changements possibles, et notamment pour la gestion des risques.
Figure SPM. 10
FIGURE SPM.10 : cette figure illustre la chose la plus importante du rapport : chaque tonne émise participe au réchauffement. Cela veut bien dire que nous avons entre nos mains notre avenir climatique, et moins nous émettrons de gaz à effet de serre, moins nous subirons de conséquences irréversibles et catastrophiques.
Atlas interactif
Le GIEC a mis à disposition un Atlas intéractif extrêmement bien fait, qui permet de voir les effets du réchauffements sur les différentes régions du monde, avec un réchauffement de +1.5°C, +2°C, +3°C, etc… La prise en main est très rapide et parlera à tout le monde, même les plus jeunes.
BONUS : INFOGRAPHIES
Le contenu des infographies ci-dessous est le même. Il existe volontairement plusieurs formats et couleurs, pour que chacun puisse sauvegarder/imprimer ce qu’elle ou il préfère :
Les traductions en plusieurs langues sont disponibles ici, et bientôt en format PDF pour impression !
Le mot de la fin
Si la synthèse était peut-être un peu longue et comprenait quelques termes difficiles en première approche, j’espère que cette synthèse vous aidera en tant que parent, professeur(e) ou enseignant(e) pour faire découvrir le sujet à toutes et tous.
Nous n’avons plus de temps à perdre : chaque tonne compte. Formons-nous, aidons les autres à se former, et passons à l’action. Si vous souhaitez en savoir plus, voici :
- Des dizaines d’heures (voire des centaines) de vidéos/articles/podcasts pour creuser tous les sujets du climat et de l’environnement
- En savoir plus sur tous les sujets climatiques (et être capable de répondre aux idées reçues/climatosceptiques) grâce à notre série d’articles avec le CNRS.